Rapports troublants entre la dépendance au jeu et la drogue
dans la rubrique : Dans l'actualité - Sur le net : Santé
par aNaKRoN67 le, 17-11-2005
Par Bruno Cormier
Des chercheurs allemands viennent d'établir des similarités déconcertantes entre le comportement d'un joueur excessif et celui d'un véritable toxicomane aux drogues dures. Les résultats de cette étude viennent tout juste d'être présentés au colloque Society for Neuroscience de Washington.
Les expériences ont porté sur 30 cobayes, 15 dépendants avérés aux jeux vidéo, et 15 joueurs plus équilibrés dans leur vie quotidienne. Les 15 premiers cultivent de gros problèmes de socialisation, et sacrifient leurs activités réelles au profit du jeu vidéo. Les 15 derniers jouent quotidiennement, mais arrivent à entretenir une vie sociale et professionnelle sans difficultés, et sans dépendance aucune.
Le premier test consistait à vérifier la théorie de la mémoire addictive (drug memory), qui s'est vérifiée chez les consommateurs de drogues dures. Le toxicomane associe intimement l'environnement et ses pulsions vers le produit stupéfiant. Par exemple, un dépendant au crack aura envie d'en consommer dès lors qu'il verra (en photo ou non) l'endroit où il en prend habituellement. Cet environnement induit chez lui l'envie de succomber à la substance.
Les 15 joueurs dépendants ont réagi de la même manière à la vue de photos de leurs jeux vidéo préférés. La simple présentation de ces captures d'écran fixes a créé en eux l'envie irrésistible d'y jouer le plus tôt possible, pour « se sentir mieux » expliquent les chercheurs. Ces mêmes photos n'ont eu aucun effet sur les autres joueurs plus modérés. De même, d'autres images de boissons alcoolisées n'ont suscité aucune réaction, alors que tout le monde déclarait aussi boire de l'alcool, mais sans excès.
Second test plus troublant encore, celui du réflexe moteur. Les chercheurs ont surveillé les sursauts d'un muscle de l'oeil bien connu des neurologues. En théorie, plus les images sont déplaisantes, plus ce muscle aura le réflexe de sursauter, sans aucune possibilité de le contrôler volontairement. À l'inverse, si une personne est stimulée de plaisir à la vue d'une image qui lui convient, ce muscle réagira moins. Chez les dépendants aux jeux vidéo, ces réflexes de sursauts furent très rares selon l'étude.
Pour les chercheurs qui ont mené l'étude, ces deux résultats d'expérience sont dûs à la diffusion de dopamine dans le corps du sujet. Une sécrétion d'hormone qui procure le plaisir et la détente, et qui est la principale cause de toute dépendance selon eux. Être dépendant à une activité, c'est y trouver le seul moyen de sécréter de la dopamine ; « C'est le même mécanisme pour tous les dépendants » explique Sabine Grüsser, co-auteur de l'étude avec Ralf Thalemann.